Une journée (pas) comme les autres

Infirmière Messages : 12 Date d'inscription : 18/07/2013

Les premiers rayons du soleil pénétraient dans la petite chambre qu'elle occupait dans ce qui avait été autrefois la maison de l'intendant et qui se trouvait toute proche du dispensaire dans lequel elle travaillait depuis plusieurs mois maintenant.

Maureen n'avait pas mis longtemps à s'habituer à son nouvel environnement et son travail d'infirmière lui plaisait énormément. Elle avait eu beaucoup de chance de pouvoir entrer au service du Seigneur de Montbozon, tout le monde n'en disait que du bien tant au manoir que dans le petit village.

Son idée de créer un dispensaire avait été fortement appréciée au village et il ne se passait pas une journée sans qu'elle ne dût faire un pansement à un ou deux maladroits... Mais depuis quelque temps, avec les guerres alentours, les chambres ne désemplissaient pas, chacun venant s'y ressourcer quelques jours avant de retourner au front.

Comme elle ne pouvait à elle seule aider le médecin, deux jeunes filles du village venaient chaque jour leur donner un coup de main. Au besoin, ils pouvaient aussi faire appel au personnel du manoir.

Ce matin-là, comme à son habitude, Maureen rejoignit son poste. Quittant la maisonnette, elle pénétra dans la cuisine afin de préparer le petit-déjeuner des pensionnaires. Pendant que Clara et Marie montaient le tout dans les chambres du 1er étage, elle ouvrit en grand les fenêtres des pièces du rez-de chaussée afin d'aérer un peu, remis quelques pots d'herbes médicinales sur une étagère, vérifia que le médecin avait tout ce dont il aurait besoin pour sa journée.

Les voix des filles lui parvenaient ainsi que quelques éclats de rire, elle savait qu'elles faisaient tout pour remonter le moral des blessés.

Infirmière Messages : 12 Date d'inscription : 18/07/2013

Maureen était tout à sa tâche quand elle entendit du bruit et des chuchotements sous la fenêtre de la cuisine. Jetant un œil, elle ne vit rien dans un premier temps, puis remarqua que les buissons remuaient quelque peu et pas par l'effet du vent.

Posant ce qu'elle avait en main, elle sortit et fit le tour du bâtiment en s'approchant doucement.

Deux jeunes enfants se trouvaient là, recroquevillés comme ils le pouvaient derrière les branchages, se partageant un maigre morceau de pain qu'ils avaient dû récupérer on ne sait où...

Un pincement au coeur la saisit. Elle s'agenouilla et s'adressa à eux :

Bonjour mes petits, que faites-vous donc là ?

La petite fille, toute tremblante et les larmes aux yeux, se serra un peu plus de celui qui semblait être son grand frère. Celui-ci lui mit un bras protecteur autour des épaules et dévisagea Maureen sans répondre.
Leurs visages étaient souillés de boue sèche, leurs cheveux en bataille, leurs vêtements de vraies loques...

N'ayez pas peur, je ne vous veut aucun mal, je m'appelle Maureen et vous, comment vous appelez-vous ?

De nouveau le silence...

Ce n'est pas grave, vous me le direz plus tard... Venez avec moi, je vais m'occupez de vous. Un bon bain, un bon repas, des vêtements propres. Nous aurons tout le temps de faire connaissance.

Leur prenant la main, Maureen les conduisit jusqu'à son petit pavillon, se demandant si ces petits avaient encore leurs parents et où ceux-ci pouvaient bien être...

Infirmière Messages : 12 Date d'inscription : 18/07/2013

Les petits l'avaient suivie sans dire un mot et pendant que Maureen faisait chauffer de l'eau pour leur bain, entreprenaient de se déshabiller.

Les deux grosses bassines furent bientôt pleines et chacun dans la sienne, Maureen les nettoya et frictionna à tour de rôle. Le plus dur s'avéra de démêler leurs cheveux. Elle dut recourir une ou deux fois au ciseau, le démêlage s'avérant impossible.

Au bout d'un moment, reprenant confiance, le petit garçon s'adressa à Maureen :

Moi, c'est Flavien et c'est ma petite sœur Margaux

Infirmière Messages : 12 Date d'inscription : 18/07/2013

Et bien Flavien et Margaux, comment vous sentez-vous après ce bon bain ? Tenez, en attendant que je vous trouve des vêtements, prenez ces serviettes et enroulez-vous avec.

Pendant ce temps, je vais vous préparer un bol de lait chaud avec quelques gâteaux.

Maureen fit ce qu'elle avait dit et sourit en les voyant dévorer plus que manger ce qu'elle venait de disposer sur la table. Le repas terminé, elle les interrogea :

Alors dites-moi, que faisiez-vous cachés dans le parc ? Où sont vos parents ? Quel âge avez-vous ?

Des larmes perlèrent aux yeux de Margaux tandis que Flavien répondait :

Margaux a 3 ans et moi 6. Nos parents sont partis à la guerre en nous laissant à notre grand-mère... Puis elle a été malade et elle est morte et ensuite... on a appris que nos parents avaient été tués... Nous avons dû quitter la maison et depuis on vit dans la rue... On y mendie et baissant la voix, ajouta dans un murmure, et parfois on vole de la nourriture sur le marché

Infirmière Messages : 12 Date d'inscription : 18/07/2013

C'était bien ce qu'elle craignait, les deux petits étaient seuls au monde.

Après avoir demandé à Marie de les surveiller, elle se rendit au Manoir voir Pascaline pour l'informer et voir ce qu'ils pourraient faire.

Les garder au dispensaire ? Avec tous ces gens malades et handicapés, ce n'était pas très recommandé. Peut-être pourraient-ils loger dans la 3e chambre inoccupée du pavillon où elle-même logeait avec le Dr Guillaume ?

Infirmière Messages : 12 Date d'inscription : 18/07/2013

Maureen traversa rapidement le parc qui séparait le dispensaire du manoir. Arrivée dans l'entrée, elle se fit mener auprès de la Gouvernante qui était plongée dans ses livres de comptes et sourit à son arrivée.

Maureen rendit compte à la Gouvernante de la découverte des enfants, l'informa qu'ils étaient seuls au monde, lui suggéra de les loger provisoirement dans la chambre vide du petit pavillon.

Celle-ci l'avait écoutée sans l'interrompre. Les Maîtres étaient absents pour quelques jours, la situation était urgente, elle se devait de prendre une décision en attendant leur retour.

Après avoir demandé à Maureen de l'attendre, elle s'absenta de la pièce pour revenir quelques instants plus tard, un panier au bras d'où l'on pouvait apercevoir braies, chemises et autres vêtements qu'elle avait été prendre dans le tiroir de la chambre de ses propres enfants.

Et c'est toutes les deux qu'elles repartirent vers le dispensaire...

Infirmière Messages : 12 Date d'inscription : 18/07/2013

Quand les deux femmes pénétrèrent dans la cuisine, les deux enfants étaient toujours enroulés dans leurs serviettes, sages et écoutant une histoire que Marie leur racontait.

Ils sourirent à Maureen dès son entrée et jetèrent un regard interrogateur vers Pascaline.

Celle-ci posa son panier sur la table et y étala les vêtements qu'elle avait apportés. Elle avait pris différentes tailles et jaugea à vue d'œil ce qui pourrait leur convenir.

Après avoir fait son choix, elle tendit au jeune garçon de quoi se vêtir et entreprit d'habiller la petite Margaux.

Les trois adultes furent contentes du résultat. La petite fille se mit à tournoyer sur elle-même et Flavien remercia Pascaline.

Infirmière Messages : 12 Date d'inscription : 18/07/2013

Plusieurs semaines s'étaient écoulées depuis l'arrivée des enfants. Peu à peu, la tristesse avait quitté leurs yeux et l'on pouvait maintenant entendre leurs rires.

Thomas s'était renseigné au village pour vérifier s'ils étaient vraiment orphelins et non en fugue et cela lui avait été confirmé.
Pascaline avait fait parvenir un courrier au Maître pour lui expliquer la situation et Gwenaël avait répondu par l'affirmative pour les loger dans le petit pavillon, auprès de Maureen.

Il avait fait parvenir une bourse pleine d'écus à Pascaline pour qu'elle s'occupe de les vêtir correctement et lui avait demandé de veiller à leur éducation. Dorénavant, Flavien suivrait les cours d'un précepteur en même temps que les enfants de Pascaline. Il lui serait toujours utile de savoir lire, écrire et compter. La petite Margaux, quant à elle, suivait Pascaline dans ses moindres mouvements, allant de la cuisine aux chambres, ouvrant de grands yeux en découvrant ce qui l'entourait, pauvre petite qui n'avait connu qu'une humble masure.